Si elle touche l’ensemble de l’économie suisse, la crise économique de la Covid-19 a une dimension particulière dans la région de Vallorbe, qui est marquée par une forte tradition industrielle.
Dans le sillage de l’exploitation de minerai de fer (du Mont d’Orzeires notamment), qui est attestée dès 1285, la région vallorbière se caractérise depuis plusieurs siècles par une forte densité industrielle. En 1798, 76% des personnes actives à Vallorbe le sont dans l’industrie et l’artisanat, contre 20% dans l’agriculture et 4% dans les services. Cette spécialisation est toujours manifeste aujourd’hui: si l’industrie représente 19% des emplois dans le Canton de Vaud, elle en totalise respectivement 45% et 77% pour les communes de Vallorbe et de Ballaigues.
Avec 1500 emplois (en équivalents plein temps), l’industrie vallorbière réunit des entreprises actives dans la fabrication de limes et de scies, la mécanique de précision, les moules et l’injection plastique, les technologies dentaires ou encore l’horlogerie. Ainsi, en produisant notamment des composants de machines ou de montres, elle est très sensible à l’évolution du cycle économique. Avec la crise de la Covid-19, cela se traduit actuellement à deux niveaux:
En premier lieu, les entreprises clientes de l’industrie vallorbière ont diminué leurs investissements en raison de mauvaises perspectives de profit. A cet égard, le Secrétariat d’Etat à l’économie prévoit pour 2020 une diminution de 21% des investissements en biens d’équipement, alors que la diminution de l’activité globale en Suisse devrait être de 6%. Au niveau vaudois, l’indicateur de la marche des affaires dans l’industrie établi par Conjoncture vaudoise est «fortement négatif», aussi pour les instruments de précision et la métallurgie.
Cette actualité délicate est confirmée par Emilio Lado, directeur de RMV Mecanic SA à Vaulion: «si l’activité au second trimestre était plutôt soutenue en raison des commandes passées, le coup d’arrêt se produit maintenant». Du côté des Usines métallurgiques de Vallorbe, le CEO René Ronchetti relève que la stabilité de la demande de limes dans le secteur forestier compense en partie le ralentissement du secteur horloger.
Au niveau de l’horlogerie, le choc de la Covid-19 est aussi grand, notamment en raison de la fermeture temporaire de points de vente et de la diminution du tourisme d’achat. Selon la Fédération de l’industrie horlogère suisse, les exportations horlogères du pays sont 19% plus basses en juillet 2020 qu’une année auparavant. Ce ralentissement est toutefois moins élevé pour les produits de haut de gamme, ce qui n’est pas une mauvaise nouvelle pour les entreprises de la région de Vallorbe fournissant les horlogers de la Vallée de Joux. Chez Rouages SA à Ballaigues, on signale ainsi une timide reprise dans les commandes, bien que celle-ci reste tributaire d’une énorme incertitude sur la marche des affaires. Sur l’ensemble de l’année 2020, l’industrie vallorbière semble se diriger, comme l’industrie suisse, vers une diminution de 10% à 20% de l’activité. Pour traverser ces turbulences, les acteurs interrogés rappellent l’utilité des mesures mises en place par la Confédération suisse, en particulier le chômage partiel et les cautionnements de crédit. Ces outils revêtiront encore une grande importance ces prochains mois, tant il est difficile de prévoir quelle sera l’évolution de la crise sanitaire en Suisse et au niveau international.
