Ailleurs : Une lettre de Transylvanie, Roumanie

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Ailleurs : Une lettre de Transylvanie, Roumanie

Cher Omnibus,

L’autocar frémit, à la gare routière de Cluj-Napoca. On me tend un morceau de papier avec un numéro de siège griffonné dessus. Depuis le fond du véhicule, j’aperçois un homme monter à l’avant et parler aux passagers; le bruit du moteur couvre ses paroles, mais je le vois faire le signe de croix: nous sommes protégés, le voyage peut commencer. 

Plus loin, c’est dans une épaisse boue que le 4×4 de mes hôtes nous transporte au fil des méandres de cette campagne transylvanienne faite de collines. Quelques jours dans une ferme isolée, tenue par une famille néerlandaise, et le monde se retourne; il n’y a que l’instant vécu qui compte. 

En s’installant dans cette région rurale, ce jeune couple a souhaité sortir d’une société qu’il juge  malade. Leur volonté de se soustraire à tout système réglé par des lois et des normes sociales entraine un quotidien plutôt désordonné. Leurs enfants, aux tignasses d’un blond éclatant, rient, jouent, crient, et malgré les températures hivernales, sont peu couverts. Habituée à un modèle parental où il convient de couver les enfants, je réalise que ceux-ci en grandiront pourtant bien plus résistants. 

Sur la ferme se côtoient moutons, cochons, chiens, chats et de nombreux oiseaux. C’est d’ailleurs non loin de l’enclos des poules que se trouve la caravane dans laquelle je dors – un froid isolement qui marque cette mise à distance d’avec le monde connu. Le temps se profile comme le soleil à l’horizon, et les travaux sur la ferme se font au rythme de l’astre. 

La caravane  (Photos Elodie Kleiner)

Balșa, le village le plus proche, apparaît rustique et terni par le temps. Au milieu du patelin se trouve toutefois un terrain de football détonant avec son environnement, et des drapeaux roumains flottant mollement avec le vent. À leurs côtés, l’étendard de l’union européenne, sur fond de ciel incertain. Les quelques personnes croisées font mine de m’ignorer, regards perdus dans un autre monde. Un monde qui paraît dur; mais malgré les airs délabrés du hameau, leur quotidien me semble solide: une vie modeste, ponctuée par les travaux extérieurs et les rencontres avec leurs voisins et proches. Tandis qu’on sillonne la campagne, David, le père de la famille néerlandaise, affirme que les gens d’ici sont plus heureux que ceux d’où il vient, aux Pays-Bas. Il soutient que l’auto-organisation, la simplicité et surtout la solidarité de ce peuple laissent percevoir une réalité bien plus enviable que celle d’une société individualiste poussée vers une croissance économique illusoire.

Une seule route traverse la vallée et c’est un aîné aux yeux d’un bleu nostalgique qui me prend en auto-stop jusqu’à la gare de la ville la plus proche. Les wagons sont vieux, m’avertit un passager. En effet, le compartiment à six places, fermé par une petite porte vitrée, évoque des images en noir et blanc. Je souris; tous les sabliers ne coulent pas au même rythme. Il faudra presque cinq heures pour parcourir les deux cent cinquante kilomètres qui nous séparent de la capitale de la Transylvanie, Brasov. 

Chaleureusement accueille par une connaissance de connaissance, je prends conscience de la générosité roumaine, maintes fois évoquée. Tandis que nous sommes assis autour d’une liqueur de cerise maison, Cristian me conte l’histoire de son pays, faite de la rencontre de nombreux peuples sur ce territoire tantôt sous influence romaine, hongroise, turque, austro-hongroise ou encore russe. 

Ce sont ses restes de civilisation médiévale qui font de Brasov une perle brillante sous ses toits enneigés. Le centre historique est digne d’un conte de fée: de magnifiques bâtisses aux airs slaves, de grandes églises et synagogue, et des allées princières. Ces monuments sont l’incarnation de la richesse et de la complexité de l’histoire roumaine et en inspirent même mythes et légendes. 

Vieille ville de Brasov. (Photos Elodie Kleiner)

Les collines transylvaniennes, elles, d’une autre beauté, n’ont pas de mots pour illustrer leur passé. Il n’y a que l’imperturbable répétition de courbes à l’horizon, et des jours qui recommencent tranquillement.

Après avoir goûté de l’enseignement académique traditionnel, Elodie Kleiner, jeune rédactrice de L’Omnibus, a choisi de poursuivre ses études via une formation à distance, tout en voyageant. Des découvertes qu’elle nous fait régulièrement partager.

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