Vous l’avez lu ou entendu, les écoles de notre canton doivent parfois faire appel à des retraités ou à des étudiants pour remplacer du personnel absent pour diverses raisons. Une nouvelle qui révèle un manque de vocation dans le domaine de l’enseignement. Le recours à des gens pas forcément formés fait débat. A ce propos, nous avons pu aussi rencontrer un jeune homme qui a passé par différentes options pour finalement suivre la HEP. L’Omnibus a mené l’enquête auprès de nos associations scolaires pour savoir ce qu’il en était dans notre région.
Les écoles du cercle d’Orbe se portent bien
Les directeurs des établissements primaire et secondaire d’Orbe, Laurent Delisle et Serge Geiger, se réjouissent de ne pas rencontrer actuellement de soucis de recrutement. Dans la cité aux deux poissons, les enseignants sont en suffisance et formés pédagogiquement. Certaines branches, peut-être, comme l’allemand sont parfois à flux tendu.
Au secondaire, Serge Geiger relève que, pour l’heure, la pyramide des âges dans son établissement est bien équilibrée. Les départs à la retraite sont compensés par l’engagement de jeunes titulaires, ce qui n’est pas toujours le cas dans le reste du canton. Il rappelle aussi que le récent élargissement de la grille horaire au secondaire passant de 32 à 33 périodes hebdomadaires a provoqué un appel d’air d’environ 90 postes au niveau cantonal, ce qui a pu accentuer certaines pénuries locales. L’Asior (Association scolaire interrégionale d’Orbe et région) n’est pas touchée pour l’instant. Au primaire, Laurent Delisle, relève encore que l’augmentation du taux d’activité partielle a pour conséquence que, si auparavant un enseignant couvrait un plein-temps, actuellement il faut compter 3 enseignants pour un poste.
Remplacements plus délicats
Si actuellement la situation est favorable concernant les enseignants titrés, le tableau est plus nuancé pour les remplacements. Il est extrêmement difficile de trouver des remplaçants formés comme il est peu aisé d’évaluer la profondeur de certaines incapacités. Souvent il est fait appel à des étudiants. Serge Geiger souligne que les remplaçants, au secondaire, sont toujours bien encadrés tant au point de vue administratif que concernant la matière à remplacer grâce au système des chefs de file et des répondants dans chaque discipline. A Orbe donc, la photo actuelle est positive, mais les 2 directeurs se rejoignent quant à la difficulté d’anticiper un avenir proche : que réservera la construction de Gruvatiez ? Qui viendra y résider ?
C’est la féminité qui prime !
Le directeur de l’Etablissement scolaire primaire et secondaire de Vallorbe, Ballaigues et Vallon du Nozon (VABANO), Olivier Ponnaz, ne se fait pas trop de soucis quant à ses effectifs du corps enseignant. En place à Vallorbe depuis bientôt quatre ans, il dispose d’un certain recul pour émettre ses considérations sur le sujet. Actuellement, dans l’établissement, on compte 90 enseignants dont la féminité prime, surtout dans le secteur primaire avec deux tiers d’enseignantes. Pour le secondaire, cela s’équilibre mieux. Bien sûr, il y a beaucoup de temps partiel. Entre les postulations et les départs à la retraite, cela se rajeunit bien.
Olivier Ponnaz précise: «Dans certaines branches, nous avons eu pléthore de personnel et dans d’autres c’est plus tendu. Ainsi, il y a deux ans, un manque crucial d’enseignants d’allemand, qui est une branche clé, est apparu. Le problème n’était d’ailleurs pas propre à notre établissement, mais bien dans tout le canton. Le recrutement a donc été très difficile, les mises au concours n’offrant pas de choix suffisant. Toutefois, pour cette année scolaire, je dirais que la stabilité règne.»
Locaux pour le sport
Difficile cependant pour le directeur vallorbier de faire des prévisions pour 2020 tant elles sont incertaines. Bien que située dans une région excentrée, la population devient de plus en plus mobile et elle augmente régulièrement suite aux nouvelles offres immobilières. «Donc, il faut s’attendre à une hausse du nombre d’élèves, mais on en ignore la proportion… Du coup, nous risquons un manque de locaux d’enseignement surtout pour le sport. Il y a du besoin et il faut essayer d’anticiper en «rentabilisant» au mieux l’existant.»
Pas de vrais soucis du côté de Chavornay
Selon Anne Fournand, la directrice de l’EPSCE (Etablissement primaire et secondaire de Chavornay et environs), le recrutement des enseignants permanents ne pose pas de problème particulier. Par exemple, pour la prochaine année scolaire, la planification est pratiquement terminée. Les chances de l’établissement pour des recrutements aisés résident dans son accessibilité géographique, dans le fait qu’il est formateur de nombreux stagiaires qui postulent volontiers pour un monde qu’ils ont appris à connaître et sans doute aussi par l’ambiance générale régnant dans les différents collèges du groupement.
En ce qui concerne l’appel à des remplaçants, les débuts d’année scolaire ne posent pas de problèmes particuliers, les diplômants de HEP n’ayant en général pas tous trouvé un poste fixe. En fin d’année scolaire, et comme pour tous les autres établissements, les choses se compliquent, mais jusqu’à ce jour il a toujours été possible de trouver des solutions.
Une formation particulière
Maxime, 27 ans, a toujours rêvé de faire du sport sa profession. Doué physiquement, le jeune Baulméran a tout d’abord opté très jeune pour le football. A 11 ans, avec un copain de Baulmes, il se décide à tester le hockey sur glace. A Yverdon, il est rapidement repéré et sa progression lui permet de jouer dans des équipes de très bon niveau (Lausanne HC, Fribourg avant de revenir à Yverdon en première ligue). Son double passeport, belge et suisse, lui a permis d’être sélectionné une vingtaine de fois avec l’équipe de Belgique (U18, U20, actifs).
A Macolin
A 16 ans, il se rend compte que, pour son avenir, il serait bien d’obtenir un papier professionnel, il se lance alors dans un apprentissage d’électricien. Son certificat en poche, il s’inscrit à l’école fédérale de Macolin pour obtenir un papier de «coach sportif professionnel». Après deux ans près de Bienne et la pratique de quelques remplacements dans les écoles vaudoises, il décide de suivre les cours officiels pour devenir enseignant, mais, la route est longue : il faut d’abord réussir un raccordement pour entrer à la HEP. C’est aujourd’hui chose acquise et il se réjouit maintenant de suivre dès le mois de septembre prochain sa formation de maître généraliste avec brevet d’éducation physique. Son souhait est de pouvoir enseigner en 7-8 si possible dès 2022. Il aura alors 30 ans.
Strict et exigeant
Maxime n’a pas choisi le chemin le plus droit et le plus court pour y arriver, mais ses pérégrinations lui ont permis d’avancer dans la vie et d’accumuler de nombreuses expériences. J’ai fait plusieurs remplacements en 7e-8e, mais également dans des degrés plus élevés et je me suis rendu compte que le respect de l’autre n’est plus le même qu’il y a une quinzaine d’années, que l’écoute est très partielle et qu’il faut se montrer strict et exigeant pour que la discipline règne dans la classe. A l’occasion d’un remplacement, les élèves m’ont dit lors de ma première leçon : «Vous serez bientôt «en burn-out», comme notre maître principal et notre premier remplaçant». Au lieu de me décourager, cette remarque m’a vraiment donné envie d’y arriver et de pouvoir apporter quelque chose à ces jeunes qui manquent parfois de nombreux repères.»
En conclusion, nos associations scolaires ne souffrent pas véritablement de pé-nurie même s’il n’est pas toujours facile de trouver des remplaçants ou des profs d’allemand. Faut-il en déduire qu’il est plus aisé d’enseigner à la campagne où les élèves sont probablement plus «sages» que dans les grandes agglomérations où la pression des jeunes est plus conséquente et peut mener à des épuisements professionnels fréquents (burn-out)?