L’évocation d’événements historiques ne passionne pas les foules; les soucis quotidiens – la santé, l’inflation, le réchauffement climatique, la guerre en Ukraine – sont prioritaires. Et pourtant, il y a 225 ans, notre Pays de Vaud accédait à l’indépendance…
Dans les jours à venir, les festivités commémoratives vont battre leur plein. Les sections locales des différents partis politiques inviteront leurs membres à partager le traditionnel papet vaudois. Mais que se passa-t-il donc, le 24 janvier 1798?
Ce n’est pas le lieu ici de redonner le récit complet des événements. On pourra se référer au document ci-joint, tiré du journal de Nyon du 24 janvier 1898, soit à l’occasion du centenaire de l’Indépendance, avec le recul nécessaire pour apprécier des événements. Ce court extrait insiste à raison sur le rôle de la France qui incita les Bernois à rentrer à la maison, la Suisse offrant par ailleurs à l’armée française une base opérationnelle géographiquement et financièrement intéressante. La défaite de Napoléon en 1815 par les Alliés permit ensuite à la Suisse, et particulièrement au jeune Canton de Vaud, de sortir de l’orbite française.
En fait, l’annonce de l’Indépendance du Canton, le 24 janvier 1798, ne souleva pas un enthousiasme absolu, notamment hors des villes. D’une part parce que l’occupation bernoise assurait un certain ordre sur notre territoire, et d’autre part parce que les idées révolutionnaires inquiétaient une partie de la population.
Ainsi, dans les jours qui suivirent la proclamation, comme l’explique Sébastien Rial dans son ouvrage Vaincre ou périr publié en 2000 à la Bibliothèque historique vaudoise, «La révolution a aussi engendré une autre forme de résistance, plus originale et plus inattendue: certains Vaudois opposés à la révolution ont préféré quitter leur pays pour prendre les armes et rejoindre une armée susceptible de les aider dans leur combat. Ce seront ces hommes qui, au cours des premières semaines de 1798, écriront la brève épopée de la Légion fidèle ». Une milice se constitue donc, sous le commandement du colonel de Rovéréa, qui se rendra sur territoire bernois, à Kallnach près de Morat, pour soutenir Berne.
L’étude de Sébastien Rial va dans le détail et s’intéresse aux origines sociales, professionnelles et géographiques des quelque 600 « légionnaires ». La plupart étaient d’origine plutôt modeste et exerçaient des professions manuelles; on pourra consulter utilement leur provenance par bailliage dans le document ci-dessus en annexe et on constatera que notre région n’était pas en reste!
Notre journal reviendra en mars et avril sur l’histoire vaudoise. Le 24 avril 2023 sera en effet le trois centième anniversaire de l’exécution du major Davel, dont une motion déposée au Grand Conseil vaudois demande la réhabilitation. Intéressante problématique, même s’il faut se souvenir que dans sa tentative d’insurrection contre les Bernois, Davel fut dénoncé par les autorités lausannoises…
Voici trois brefs portraits d’engagés dans la Légion fidèle (février-mars 1798),
originaires de la région d’Orbe:
Monnier, Abraham-François, Arnex
Fils de feu Isaac. 32 ans. Laboureur. Dénoncé à de multiples reprises pour le port de la cocarde bernoise. Il est condamné en 1799 pour avoir crié «Vive Berne!» dans les rues d’Orbe en compagnie du valet de Pillichody.
Jaillet, Pierre-Isaac-François, Vallorbe
Fils de Jacob. Fait prisonnier par les Français, il est emmené à Besançon. Dénoncé le 19 avril. En 1799, il sera accusé de s’être rendu en Allemagne auprès du colonel de Rovéréa.
Martin, François, Orbe
22 ans. Parti fin janvier. Blessé, il est admis à l’hôpital de l’Ile à Berne le 7 mars. Il décède le mercredi 21 mars.
Extrait de Vaincre ou périr, opus cité.
